Dossier résidences pour aînés : Un marché en pleine effervescence

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La plus récente enquête de l’Institut de la statistique du Québec démontre que le poids démographique des 75 ans et plus est appelé à croître. Ces derniers représentent près de 90 % des résidents vivant dans les complexes d’habitations pour aînés révèle cette étude. En considérant ces projections, pour maintenir le nombre de logements disponibles, il faudrait ajouter environ 26 000 unités pour 2021 et près de 100 000 pour 2031. Portrait d’un marché en fulgurante évolution.

 On compte environ 1 800 résidences pour aînés au Québec. De ce nombre, il y a 600 immeubles de moins de 10 logements et près de 70 complexes de plus de 300 unités. Le reste du parc d’habitations privées pour aînés, soit la majorité des bâtiments, abrite en moyenne une quarantaine d’appartements locatifs par adresse civique. « Le secteur est donc principalement composé de petites résidences pour personnes âgées », explique Yves Desjardins, président-directeur général du Regroupement québécois des résidences pour aînés (RQRA).

Alors que l’on constate un nombre grandissant de fermetures de petites résidences établies un peu partout dans les villes et villages de la province, on observe une nette progression du nombre de grands établissements multiservices bien implantés, ou en chantiers, dans les plus grands centres, note le RQRA. « De toute évidence, les grandes résidences se portent bien alors que les plus petites tentent de surnager, acculées à des déficits financiers récurrents, mettant
en danger leur survie. La capacité de payer de la clientèle en place, souvent limitée, et les coûts d’exploitation fixes qui sont en revanche élevés, expliquent cet équilibre précaire », observe Yves Desjardins.

Prendre le virage

L’incendie de la résidence pour aînés de L’Isle-Verte, qui a provoqué le resserrement de l’encadrement du marché, est l’un des facteurs qui a le plus contribué à la hausse progressive des loyers des résidents. Ces
augmentations sont surtout liées à des rénovations essentielles, dont l’ajout de gicleurs pour assurer la sécurité.

À cet égard, le RQRA déplore à ce jour 370 fermetures de petites résidences. « Seuls les grands joueurs de l’industrie sont en mesure de veiller à la pérennité de ces immeubles », estime Yves Desjardins.

À ce titre, l’industrie québécoise des résidences privées pour aînés compte cinq grands acteurs immobiliers, soit Cogir, le Groupe Maurice, Sélection Retraite, Chartwell et le Groupe Savoie. Ces enseignes sont surtout présentes dans les grands centres urbains que sont Montréal, Québec et Gatineau, sites recoupant le plus grand nombre d’unités dans ce marché de spécialité.

Aussi, le développement de cette catégorie de résidences gagne de plus en plus d’importants centres régionaux comme Saint-Jérôme, Trois-Rivières, Drummondville, Sherbrooke, voire Rimouski et Rivière-du-Loup où les besoins augmentent. Ces agglomérations victimes de plusieurs fermetures de petites résidences voient désormais poindre de belles solutions pour l’avenir.

« Or, des régions plus éloignées, comme la Gaspésie, sont de plus en plus mal desservies, plaide Yves Desjardins. Dans ce dernier cas, c’est un véritable drame. Faute de solutions d’hébergement adaptées à leur condition, des aînés se voient contraints de quitter leur communauté. Ils sont déracinés. »

Heureux en résidence

À la demande du RQRA, la firme Léger a mené au printemps 2017 un sondage auprès de 1 200 retraités vivant dans des résidences pour aînés membres du Regroupement de toutes les tailles et réparties dans toutes les régions du Québec. Les résultats sont éloquents : 94 % des répondants se disent satisfaits de leur résidence et 91 % la recommanderaient à un ami. Pour expliquer cet engouement, Yves Desjardins souligne que ces milieux de vie aux multiples services à la carte se sont parfaitement adaptés aux défis des générations.

« On retrouve ainsi dans les cuisines des salles à manger des grandes résidences privées pour aînés des chefs accomplis pour concocter des plats variés, équilibrés et savoureux. On offre aussi des heures de restauration étendues pour permettre à la clientèle de goûter aux plaisirs de la table après le traditionnel 17 heures qui marque l’habitude de plusieurs septuagénaires », ajoute le président-directeur général.

Mais le bonheur d’y vivre s’explique également autrement. Ces aires de vie pour aînés autonomes brisent l’isolement en favorisant les activités, les rencontres et la mobilité. C’est dans ce même dessein que les grands joueurs de l’industrie créent des parcs de résidences évolutives. Des milieux de vie convenant aux personnes en perte progressive d’autonomie, qui permettent à un couple de ne pas être séparé, en vivant dans des environnements tout aussi luxueux, mais bien adaptés aux différentes réalités, dans un même édifice. Un service qui ne peut cependant être assuré dans de plus petits établissements privés, par manque de ressources logistiques et financières. Un constat auquel s’ajoute un manque criant de disponibilité d’appartements pour aînés en région. Un problème moins observé dans les grands centres, mais qui mérite tout de même qu’on s’y attarde.

Maintenir l'offre

« Dû au vieillissement de la population, il s’ajoute chaque année au Québec environ 30 000 nouveaux aînés de 75 ans. Uniquement pour respecter ce ratio minimal de disponibilité d’appartements, il faudrait ajouter près de 6 000 unités de location en 2018 », dit Yves Desjardins.

La Société canadienne d’hypothèques et de logement précise dans les faits que pour maintenir l’offre suivant la courbe de progression du vieillissement, il faudrait construire à un rythme soutenu 5 000 unités par année d’ici 2037. C’est la raison pour laquelle on assiste à des agrandissements, voire à plusieurs nouvelles constructions de résidences pour aînés dans certaines régions.

« La courbe démographique démontre qu’il y aura dans l’avenir encore beaucoup de besoins à combler, affirme Michel Bouchard, vice-président Immobilier du Groupe Maurice. Les premiers baby-boomers ont déjà atteint la plage des 70 à 75 ans et notre produit correspond à leurs attentes. Les données révèlent de plus qu’une plus grande portion de la population à l’heure actuelle est formée de gens qui viennent de s’engager dans la retraite. »

Or, l’industrie des résidences privées pour aînés est relativement jeune, dit Michel Bouchard. « Elle a été créée il y a environ quatre décennies. Nous avons construit nos premières résidences dans cette foulée il y a 20 ans. La première génération de résidences offrait des logements typiques de l’époque et des aires communes vraisemblablement plus modestes qu’aujourd’hui. »

Nouvelles résidences

 Les résidences que nous construisons maintenant sont passablement différentes en termes de grandeur des unités locatives, de fenestration et de hauteur de plafond, mentionne M. Bouchard. Les espaces communs sont également plus majestueux et attrayants. En fait, on se doit tout simplement d’évoluer au même rythme que les attentes et les goûts de notre clientèle, qui est bien différente de celle d’il y a 20 ans. Les aînés d’aujourd’hui viennent en résidence par choix beaucoup plus que par nécessité ou en raison d’un pépin de santé. »

« Ils ont souvent envie de voir du monde, de socialiser. C’est pourquoi nos résidences comptent plusieurs aires de divertissement et des lieux pensés pour favoriser l’interaction communautaire. Des salles de quilles et de billards aux bibliothèques jusqu’aux salons avec vue panoramique au sommet des tours, tout est prévu pour optimiser l’offre de services et le bonheur d’y vivre », poursuit-il.

« Aussi, afin de contribuer à l’indépendance et aux bien-être des résidents, nous érigeons nos résidences dans des secteurs offrant plusieurs services et commerces de proximité, sur des sites qui facilitent d’emblée la mobilité. Des endroits qui se prêtent au déplacement actif, à l’usage de l’automobile autant qu’au transport collectif. »

Groupe MauriceSalon de billard de la résidence Le 22, arrondissement de Saint-Léonard à Montréal. Crédit photo : Groupe Maurice

 Ingrédient essentiel

« Ce produit d’habitation se retrouve principalement dans les grands centres urbains, explique Michel Bouchard. Tous nos sites sont agrémentés de jardins, de boisés ou de promenades privés. Certaines résidences sont également construites à côté de parcs publics municipaux. Dans tous les cas, elles se retrouvent dans des secteurs résidentiels paisibles à l’orée d’une artère commerciale, près d’un supermarché, d’une clinique médicale et d’une institution financière, des services privilégiés par les aînés. C’est dans notre ADN de s’établir dans des quartiers offrant une belle qualité de vie. Des endroits permettant aux aînés de marcher ou de circuler en voiture en toute confiance et sans stress. »

Tendance du marché

Le Groupe Maurice compte une trentaine de résidences au Québec. Cinq sites sont présentement en chantier. Dans les cartons se retrouvent des projets à l’étude, dont plusieurs à être déployés dans les dix prochaines années. « Dans certains endroits où la profondeur des marchés le permet, nous construisons des unités de copropriétés pour aînés, en plus de la formule locative », indique M. Bouchard.

« Le développement des résidences privées pour aînés nécessite une connaissance approfondie des habitudes de vie des résidents, en plus d’exiger des propriétaires de parcs immobiliers d’importantes compétences de gestion. Au-delà du raffinement des concepts de restauration, de soins de santé et de récréologie, nous définissons des aires de vie offrant un maximum de sécurité, notamment sur le plan de la prévention des incendies, précise Michel Bouchard. À cet égard, nos édifices sont faits de béton et pourvus de systèmes non invasifs de surveillance. Nous suivons également de près l’évolution des lois et règlements prévus afin de demeurer en tout temps conformes aux normes et législations en vigueur. »

 Société distincte

En plus du volet sécurité, « c’est au Québec que la nature des projets de résidences pour aînés est la plus imposante en termes de superficie de bâtiment et d’espaces locatifs, par opposition au reste du pays », admet
Maxime Camerlain, vice-président Stratégies d’intégration immobilière du Groupe Chartwell, le plus important gestionnaire de résidences privées pour aînés au Canada.

Le groupe qui possède des résidences en Ontario, en Alberta et en Colombie- Britannique, compte près de 50 complexes au Québec. Le Québec constitue environ la moitié du volume total d’appartements construits par Chartwell au pays. En effet, le groupe possède 26 000 unités locatives dans 4 provinces, dont 12 000 au Québec. « C’est le modèle que l’industrie a mis sur pied il y a une trentaine d’années qui est à la source de ce départage », explique Maxime Camerlain.

« Le concept d’origine, lancé au Québec, reposait sur une philosophie de lieux de résidences assortis de services à la carte. Or, au même moment, dans le reste du pays se déployait un modèle différent, une formule axée sur une offre d’unités de type suite d’hôtel, en format tout inclus avec cuisinette, pourvu d’un service quotidien d’entretien ménager et de trois repas par jour. »

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À Cap-Rouge, le Groupe Chartwell propose des unités avec grande cuisine familiale. Crédit photo : Groupe Chartwell

 Modèle de référence

« Cette variance de modèle crée des milieux de vie différents au Québec, concède Maxime Camerlain. Ici, les retraités cherchent davantage à profiter d’un appartement complet, c’est-à-dire d’un logement doté d’une cuisine pour préparer les repas et continuer de vivre de façon plus autonome. Une formule qui permet d’emblée au consommateur de faire des choix sur ce qui est compris dans le loyer. »

Ce modèle permet aux opérateurs de maintenir une offre de prix compétitive. Afin de conserver cette tendance, les promoteurs ont augmenté le nombre d’unités, ce qui leur a permis de trouver un bon équilibre entre l’offre de service et le niveau d’attractivité. »

Le Groupe Chartwell voit dans cette idée née au Québec une tendance d’avenir pancanadienne. « Nous avons d’ailleurs commencé à implanter ce concept d’habitations dans les autres provinces et la réception est excellente », souligne M. Camerlain.

Avant-gardisme

Un premier projet fondé sur ce que nous observons au Québec vient d’être inauguré avec succès dans le Grand Toronto, précise le porte-parole du plus important groupe de résidences privées pour aînés au Canada. Exportable, cette idéologie québécoise très bien accueillie au centre et dans l’ouest du pays, fascine et façonne l’industrie », conclut Maxime Camerlain.

Photo page d'accueil - crédit photo : Groupe Chartwell
Photo introduction - crédit photo : Groupe Maurice

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