Intéresser les entrepreneurs à soumissionner sur les projets publics : défi du prochain gouvernement

Intéresser les entrepreneurs à soumissionner sur les projets publics : défi du prochain gouvernement
Jean-Francois Arbour
Jean-Francois Arbour
Chroniqueur actualités

La pandémie nous a rappelé à quel point la chaîne d’approvisionnement de l’industrie de la construction est fragile et soumise aux conditions du marché mondial. La disponibilité des matériaux de construction et la volatilité des prix ont fait prendre conscience aux entrepreneurs et aux donneurs d’ouvrage publics que les façons de faire du passé ne devraient pas être garantes du futur.

Les marchés publics sont de plus en plus complexes. Les contrats eux-mêmes constituent un rempart utilisé par les donneurs d’ouvrage pour, entre autres, se protéger contre toute possibilité de recours, compte tenu de leurs propres enjeux de main-d’œuvre et le déficit d’expérience de leurs intervenants. Résultat des courses : certains d’entre eux peinent à recevoir des soumissions.

Si l’ACQ a été particulièrement active sur ce dossier au cours des derniers mois en mobilisant les acteurs de l’industrie et les donneurs d’ouvrage publics pour tenter de trouver des solutions1, les entrepreneurs qui réclamaient, et réclament toujours des clauses d’ajustement de prix, semblent hésitants le moment venu à les utiliser alors que les donneurs d’ouvrage publics, nous le répétons, font face à des enjeux d’expertises pour appliquer de telles clauses ou font face à des barrières de nature juridiques que l’on ne doit pas négliger.

Nous débutons à peine notre travail de collaboration avec les donneurs d’ouvrage et, alors que le besoin est immédiat et très pressant, le type de changement requis, lui, ne peut pas être précipité. Il doit être élaboré, compris, ajusté, corrigé pour en faciliter l’usage et obtenir éventuellement les effets escomptés.

Si, de l’avis de certains, les clauses d’ajustement de prix ne règlent pas sans coup férir les problèmes de surenchère des prix, pour l’ACQ, elles constituent très certainement un pas dans la bonne direction et une ouverture à la discussion, à la collaboration basée sur une communication franche et honnête de tous les intervenants dans la recherche de solutions pour tous.

Si on souhaite enfin combler le déficit d’entretien des infrastructures publiques tout en poursuivant nos investissements massifs pour répondre aux besoins des Québécois, l’ACQ est d’avis que le prochain gouvernement devra demeurer proactif et s’engager à maintenir un dialogue ouvert et constant avec l’industrie.

Notamment, afin de mettre sur pied une stratégie pour réduire les délais de paiement, améliorer la planification des travaux afin de réduire le fardeau inhérent aux avis de changement et trouver les solutions pour augmenter le nombre de soumissionnaires. Les municipalités ne doivent pas faire bande à part et être invitées à cette table, car elles font elles aussi les frais des conditions volatiles du marché.

Parallèlement à cet exercice, le gouvernement devra poursuivre ses efforts pour soutenir la chaîne afin que l’industrie de la construction soit plus autonome et qu’elle dépende moins des matériaux produits à l’étranger.

De plus, les niveaux d’activités de notre industrie devraient demeurer très élevés au cours des 10 prochaines années alors que les bassins de main-d’oeuvre diminuent. Pour contrer la pénurie de main-d’œuvre qualifiée dans notre industrie, nous devrons regarder ailleurs dans le monde et déployer un programme de travailleurs étrangers temporaires spécifique au secteur de la construction afin de lever les barrières qui limitent l’arrivée des travailleurs de l’international.

En résumé, même si notre industrie est fortement sollicitée, les entrepreneurs souhaiteraient en faire plus pour les Québécois, notamment en construisant davantage d’unités d’habitation et en rénovant nos écoles et nos hôpitaux. Pour y arriver cependant, le prochain gouvernement devra mettre de l’avant des conditions gagnantes pour intéresser les entrepreneurs à soumissionner sur les projets publics, tout en évitant les erreurs du passé. Le dialogue et la concertation sont donc nécessaires plus que jamais.

Il appartiendra au prochain gouvernement de faire preuve de leadership et de stimuler l’intérêt envers les marchés publics, sans quoi le nombre de soumissionnaires restera au plus bas.

1 Elle a notamment travaillé en collaboration avec la Société québécoise des infrastructures (SQI) et d’autres partenaires de l’industrie afin d’élaborer une clause d’ajustement des prix des matériaux.

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