Les acomptes, comment ça fonctionne?

François-Olivier Godin, avocat, Bélanger Paradis avocats
François-Olivier Godin, avocat, Bélanger Paradis avocats
Chroniqueur Juridique

Plus souvent qu’autrement, l’entrepreneur exige de son client un acompte à la signature d’un contrat préliminaire de vente ou à la signature d’un contrat d’entreprise. Cet acompte, tout en permettant à l’entrepreneur de réduire le montant de financement à obtenir pour son projet, lui permet de s’assurer du sérieux du client dans sa démarche. Saviez-vous que cet acompte, en vertu du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs¹ (le Règlement), peut bénéficier d’une couverture de garantie pouvant aller jusqu’à 39 000$? Est-ce que parfois l’entrepreneur est tenu de le remettre? Est-ce que c’est possible de le garder si le client ne veut plus acheter?

Considérant que le Règlement fut instauré dans un but de protection du bénéficiaire, il est bien normal de voir la couverture de garantie s’étendre aux sommes remises à l’entrepreneur avant la livraison du bâtiment. Ainsi, un acompte versé à un entrepreneur accrédité est admissible à une couverture de garantie jusqu’à concurrence de 39 000$² . Cette protection mise en place par le Législateur vise notamment à protéger les acomptes versés à des entrepreneurs ayant de sérieux problèmes de solvabilité ou tout simplement frauduleux, de manière à éviter que les clients perdent cette somme si la livraison du bâtiment n’a jamais lieu.

La remise de l’acompte à l’acheteur

Dans une très grande proportion, les contrats préliminaires de vente ou les contrats d’entreprise sont conditionnels à la réalisation d’une condition suspensive. Ainsi, il est généralement prévu qu’en cas de non-réalisation de cette condition dans un certain délai, l’entrepreneur devra remettre l’acompte à l’acheteur puisque le contrat n’aura pas de suite.

À titre d’exemple, cette situation se présente fréquemment quand l’acheteur n’est pas en mesure d’obtenir son financement hypothécaire ou quand il n’est pas en mesure de vendre sa propriété dans les cas où il s’agit d’une condition essentielle à la réalisation du contrat. L’entrepreneur est donc tenu de remettre l’acompte versé dans un tel cas puisque le contrat signé entre les parties n’aboutira pas à la réalisation d’une vente ou d’une construction.

Il est de plus parfois possible pour l’acheteur, moyennant certaines modalités, de mettre fin au contrat et de récupérer l’acompte versé en cas de défaut de l’entrepreneur de respecter ses obligations.

La conservation de l’acompte

Certaines situations permettent à l’entrepreneur de conserver l’acompte versé quand on met fin au contrat. Cela peut être notamment le cas avec un client qui refuse de passer titre une fois la date de livraison prévue au contrat arrivée à échéance, encore faut-il que l’entrepreneur ne tente pas de forcer la passation de titre.

D’autres cas, comme la signification d’un refus d’acheter découlant d’une perte d’emploi, de la séparation du couple acheteur ou encore l’achat d’une tierce propriété permettent de mettre fin au contrat sans avoir à rembourser l’acompte puisque dans ces cas, c’est le client qui met unilatéralement fin au contrat.

La seule exception qui prévaut en matière de résiliation unilatérale d’un contrat consiste en la faculté de dédit³ par laquelle l’acheteur peu, dans un délai de 10 jours suivant la signature du contrat, se dédire de celui-ci (i.e. y mettre fin unilatéralement) moyennant le paiement d’une pénalité équivalente à 0.5% du prix de vente. C’est une disposition d’ordre public à laquelle il n’est pas possible de déroger.

En bref, à moins que l’entrepreneur fasse défaut de respecter ses obligations, dans le mesure où le contrat n’est pas assorti d’une condition suspensive et que plus de 10 jours se sont écoulés depuis sa signature, l’entrepreneur pourra, règle générale, conserver le l’acompte versé si c’est le client qui met fin au contrat. Voilà une bonne raison d’être à son affaire!

Saviez-vous que?

Plus une clause est imprécise, plus il existe de manière de l’interpréter. Assurez-vous d’assortir d’un délai fixe les clauses conditionnelles suspensives et de bien prendre le temps de remplir convenablement un contrat et ses annexes. N’oubliez pas : les paroles s’envolent, mais les écrits restent!


  1. RRQ, c B-1.1, r 8
  2. Article 13, Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs
  3. Articles 1785 et 1786 du Code civil du Québec

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