Décisions de l'administrateur du plan de garantie : finales et sans appel ?

François-Olivier Godin, avocat, Bélanger Paradis avocats
François-Olivier Godin, avocat, Bélanger Paradis avocats
Chroniqueur Juridique

Dans le cadre de l’application du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, c’est l’administrateur du plan de garantie qui a la prérogative de trancher sur l’admissibilité à la couverture de garantie les problématiques qui lui sont dénoncées et, le cas échéant, d’ordonner la réalisation de travaux correctifs1. En cas d’insatisfaction du bénéficiaire ou de l’entrepreneur quant à la décision rendue par l’administrateur du plan de garantie, ceux-ci peuvent la porter en arbitrage2 : le Tribunal arbitral rendra alors une décision qui sera finale et sans appel3. Mais s’ils ne portent pas la décision de l’administrateur en arbitrage, est-elle finale et sans appel ?

La réponse est oui. La décision de l’administrateur, si elle n’est pas portée en arbitrage par une des parties impliquées conformément à ce que prévoit le Règlement, est une décision finale et sans appel. Cela a été récemment confirmé par le Tribunal dans un jugement récent de la Cour du Québec4.

Une décision, mais pas d'arbitrage

Dans le cadre de ce dossier, l’administrateur avait fait exécuter les travaux correctifs ordonnés dans sa décision quant à des déficiences reconnues comme admissibles à la couverture de garantie étant donné le défaut de l’entrepreneur de s’exécuter. La décision de l’administrateur ordonnant des correctifs avait été initialement portée en arbitrage par l’entrepreneur, mais faute d’avoir versé la provision pour frais requise, l’arbitrage n’avait jamais eu lieu.

Décision contestée

L’administrateur se portait donc demandeur contre les cautions afin de recouvrer le coût des travaux correctifs exécutés en sus des pénalités applicables puisque l’entrepreneur (le débiteur principal de l’obligation) était
insolvable. Aussi, bien que l’administrateur ait reconnu comme admissibles les déficiences dénoncées par les bénéficiaires et déjà effectué les travaux, les cautions niaient devoir quelconque somme et contestaient la réclamation devant la Cour en plaidant notamment que divers éléments corrigés n’étaient pas déficients ou n’auraient pas dû bénéficier de la couverture de garantie puisqu’ils avaient été dénoncés tardivement.

En somme, les cautions plaidaient que la décision de l’administrateur était mal fondée et qu’elles ne devaient pas être condamnées sur la base de cette décision.

Décision finale

Or, le Tribunal ne partageait pas l’avis des cautions et a rejeté ces moyens de défense. Le Tribunal a indiqué que puisque l’entrepreneur ne s’était pas prévalu de son droit de contester la décision en arbitrage, la décision de l’administrateur était finale et sans appel, tout comme l’aurait été une décision d’arbitre. Il a indiqué de plus que puisque l’entrepreneur ne pouvait plus contester la décision, les cautions, qui ne pouvaient faire indirectement ce que le débiteur principal de l’obligation (l’entrepreneur) ne pouvait faire directement, ne pouvaient non plus la contester.

Enfin, le Tribunal a résumé sa pensée en indiquant sur le sujet de la contestation de la décision devant les tribunaux civils qu’« en raison de l’économie du régime du plan de garantie obligatoire des bâtiments résidentiels neufs, des règles en vertu du Règlement et celles du Code civil du Québec, il n’est plus possible ni [ au débiteur principal ] ni aux [ cautions ] de le faire ».

 En résumé, sachant qu’une décision de l’administrateur non contestée en arbitrage est finale et sans appel, une partie insatisfaite de cette décision à tout intérêt à la contester en temps opportun en arbitrage sous peine de se la voir imposer une fois devant les tribunaux de droit commun.

LE SAVIEZ-VOUS ?
Seul un organisme voué à l’arbitrage de différends peut être autorisé par la Régie du bâtiment du Québec pour organiser l’arbitrage prévu par le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.

1 Articles 18 et 34 du Règlement
2 Articles 19 et 35 du Règlement
3 Articles 20 et 36 du Règlement
4 Garantie habitation du Québec inc. c. Quirion, 2018 QCCQ 1549 (CanLII)

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