Le devoir d'information et de conseil de l'entrepreneur

Le devoir d'information et de conseil de l'entrepreneur
François-Olivier Godin, avocat, Bélanger Paradis avocats
François-Olivier Godin, avocat, Bélanger Paradis avocats
Chroniqueur Juridique

Le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs prévoit certaines exclusions, notamment quant aux réparations rendues nécessaires par une faute du bénéficiaire tel l’entretien inadéquat1. Pourtant, pour être en mesure de reprocher une absence d’entretien au bénéficiaire, encore faut-il que le bénéficiaire ait été informé de l’entretien requis. Qu’en est-il du devoir d’information et de conseil de l’entrepreneur ?

D’emblée, notons que la jurisprudence arbitrale traitant du Règlement2 reconnaît les obligations de l’entrepreneur quant à son devoir d’information et de conseil. Ces obligations sont issues du droit civil et sont étroitement reliées à l’obligation de bonne foi, comme quoi un cocontractant (par exemple un bénéficiaire) doit être renseigné et conseillé par son entrepreneur afin de fournir un consentement libre et éclairé.

Ces obligations s’appliquent au moment de la réalisation du contrat, par exemple en ce qui concerne le choix des matériaux, mais aussi une fois l’ouvrage exécuté, notamment en ce qui concerne l’entretien adéquat requis. Ainsi, comme l’indique le professeur Karim à propos des entrepreneurs relativement à l’obligation de conseil, « […] en plus de se plier à l’obligation de renseignement, ils devront également s’assurer de la compréhension du client et son assimilation de ces renseignements afin qu’il soit en mesure de s’en servir adéquatement et de manière pertinente3 ».

Illustrons ces obligations par un cas pratique, par exemple une décision d’un administrateur de plan de garantie rejetant une réclamation concernant un plancher de bois dont l’état s’est dégradé. Dans notre exemple, la réclamation est rejetée sous prétexte d’une mauvaise gestion de l’humidité ambiante, laquelle peut être assimilée à une « faute du bénéficiaire ». Le bénéficiaire porte la décision de l’administrateur en arbitrage sous prétexte qu’il n’a pas commis de faute puisqu’il ignorait devoir contrôler l’humidité ambiante afin de préserver l’état du plancher. En l’espèce, « le fardeau est sur le demandeur Bénéficiaire quant aux obligations d’information et de conseil de l’Entrepreneur pour les fins de déterminer s’il y a manquement à ces obligations au sens et dans le cadre du Règlement pour fins d’ouverture à la couverture de la Garantie4 ».

Bref, si le bénéficiaire est en mesure de convaincre le Tribunal que son entretien ou sa faute résulte d’un manquement de l’entrepreneur quant à ses devoirs de renseignement et de conseils, la décision de l’administrateur pourrait être révisée et la problématique pourrait bénéficier d’une couverture de garantie. À l’inverse, si le Tribunal est d’avis que les obligations d’information et de conseil de l’entrepreneur ont été dûment acquittées, par exemple en prouvant la remise au bénéficiaire d’un manuel d’entretien, la décision de l’administrateur sera maintenue.

Dans ces circonstances et afin d’éviter des problèmes potentiels, l’entrepreneur avisé devra s’assurer d’être toujours en mesure de démontrer le respect de ses obligations HABITATION quant à son devoir d’information et de conseil en documentant son dossier avec des écrits, notamment des accusés de réception attestant la remise de manuels d’entretien ou d’autres informations quant aux matériaux.

LE SAVIEZ-VOUS?
Sont exclues de la garantie prévue au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs les promesses d’un vendeur à l’égard des coûts d’utilisation ou de consommation d’énergie d’appareils, de systèmes ou d’équipements entrant dans la construction d’un bâtiment.

¹ Voir notamment à cet effet « Le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs : les exclusions au règlement » publiée le 5 octobre 2017 sur ACQConstruire.
2 Voir notamment à cet effet Blais et Villas Construction 2006 inc., Me Jean Philippe Ewart, arbitre, Société pour la résolution des conflits inc. (SORECONI), 120708001 et 132502001, 2013-10-21.
3 KARIM, Vincent, Contrats d’entreprise (ouvrages mobiliers et immobiliers : construction et rénovation) Contrats de prestation de services et l’hypothèque légale, Éd. Wilson & Lafleur, 2e édition, 2011, par. 354.
4 Montréal (Office municipal d'habitation de) et Consortium MR Canada ltée, Me Jean Philippe Ewart, arbitre, Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC), S12-020901-NP et S13-031503-NP, 2015-05-15, par. 83.

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