Selon l’article 2728 du Code civil du Québec, l’hypothèque légale de la construction est limitée aux travaux, matériaux et services fournis qui suivent la dénonciation écrite du contrat au propriétaire.
Les sous-traitants ont donc l’obligation de dénoncer leur contrat au propriétaire en temps opportun afin de pouvoir bénéficier pleinement du droit à l’hypothèque légale.
Dans l’affaire Produits forestiers D&G ltée c. Structures MH inc. 2022 QCCA 970, la Cour a déclaré nuls les avis d’hypothèques légales publiés par un sous-traitant car son contrat n’avait pas été dénoncé au propriétaire.
Les faits
En 2019, Produits forestiers D&G ltée (D&G) entreprend des travaux de construction dans son usine. D&G confie le contrat d’entreprise générale pour la réalisation des travaux à Construction KTG (KTG). Dans le cadre de l’exécution de ses travaux, KTG octroie un contrat de sous-traitance à Structures M.H. inc. (M.H.). Dans le cadre de l’exécution de ses propres travaux, M.H. octroie deux contrats de sous-traitance pour la fourniture de matériaux, dont l’un à Métalium inc. (Métalium) et l’autre à Le Groupe Canam inc. (Canam).
Il convient de mentionner que Métalium et Canam ont dénoncé leurs contrats par écrit au propriétaire, D&G, conformément à l’article 2728 du C.c.Q. Quant à elle, M.H. n’a jamais dénoncé son contrat à D&G.
Suivant l’exécution de ses travaux et toujours impayée, le 16 octobre 2020, M.H. procède à la publication de trois avis de conservation d’hypothèques légales sur les trois lots constituant l’immeuble de D&G. Environ deux mois plus tard, l’entrepreneur général, KTG, fait cession de ses biens.
Le 24 février 2021, M.H. publie un préavis d’exercice d’un droit hypothécaire pour chacun des trois lots de l’immeuble de D&G. D&G conteste le droit pour M.H. de publier des hypothèques légales et préavis d’exercice, car M.H. a fait défaut de lui dénoncer par écrit son contrat conclu avec KTG. Le 1er mars 2021, D&G produit donc une demande en radiation des avis d’hypothèques légales et préavis d’exercice, demande sur laquelle porte la présente décision.
La Cour d’appel renverse la décision et accueille la demande de radiation de D&G, déclarant nuls les avis d’hypothèques légales et préavis d’exercice publiés par M.H.
La Cour supérieure donne raison à M.H. puisque selon elle, les dénonciations de Métalium et Canam suffisaient pour informer D&G de l’existence du contrat conclu entre KTG et M.H.
La Cour d’appel énonce que la dénonciation écrite d’un contrat sert à répondre à 2 objectifs, soit de permettre au propriétaire :
- D’éviter de voir son bien grevé d’une hypothèque en faveur d’un tiers à la relation contractuelle; et
- De retenir une somme suffisante qui doit être payée à l’entrepreneur principal pour les travaux exécutés par ce tiers.
Selon la Cour d’appel, le propriétaire n’a pas l’obligation de se renseigner quant aux contrats intervenus entre l’entrepreneur général et ses sous-traitants.
De plus, il n’y avait aucune preuve indiquant que D&G avait renoncé à recevoir une dénonciation écrite. Qui plus est, il n’y avait aucune preuve permettant de conclure que D&G aurait participé aux négociations avec M.H. ou qu’elle était au courant de l’exécution des travaux effectués par M.H., ce qui aurait pu exceptionnellement pallier le défaut de M.H. d’avoir dénoncé son contrat.
À retenir : Le texte de l’article 2728 C.c.Q. permet au sous-traitant qui n’a pas contracté directement avec le propriétaire de grever son immeuble d’une hypothèque légale. Une condition doit cependant être respectée : il doit dénoncer par écrit son contrat au propriétaire.