© Diago architecture et design
L’heure est à l’environnement et au développement durable. Une tendance de fond qui touche tous les secteurs, y compris celui du bâtiment.Tour d’horizon et guide pratique.
Le projet La Géode, en plein cœur de Montréal, a été le premier bâtiment multifamilial au Canada à recevoir la certification LEED Platine V.4, soit la plus élevée. Situé à moins de 500 mètres d’une station de métro et à proximité des services d’autopartage et de vélopartage, l’immeuble répond aussi aux plus hautes normes écologiques en matière de construction. Par exemple, la typologie a été réfléchie de manière à augmenter la lumière et la ventilation naturelles. Sans compter l’aménagement qui fait la part belle au verdissement, notamment avec des plantes indigènes nécessitant peu d’entretien, décrit Jean-François St-Onge, architecte et cofondateur d’ADHOC architectes.
Situé sur le Plateau Mont-Royal à Montréal, il s’agit là d’un des nombreux exemples d’édifices érigés selon les principes du développement durable. Plus qu’une mode, une tendance de fond, constate Hugo Lafrance, directeur stratégies durables à la firme Lemay. « Les chiffres montrent bien cet engouement, alors que le Canada est le deuxième pays où on dénombre le plus de projets LEED et le Québec est la province la plus dynamique à ce chapitre », souligne l’architecte également impliqué dans la section québécoise du Conseil canadien du bâtiment durable du Canada.
© ADHOC architectes
Et ce, sans compter les nombreuses initiatives qui ne sont pas comptabilisées. En effet, si les différentes certifications garantissent la démarche des entrepreneurs, en plus de permettre un suivi, il est possible de s’en inspirer pour construire de façon écoresponsable. Par exemple, la firme Diago, architecture et design, tente de se conformer aux principes du développement durable dans tous ses projets. Le côté écolo prendra plus ou moins d’ampleur, selon la volonté du client et… de son budget.
Ça peut être séduisant de vendre des technologies comme des panneaux solaires, mais il existe une série de mesures gratuites ou à moindre coût pour améliorer le bilan environnemental d’un bâtiment. Et c’est là-dessus que nous misons en premier », explique Benoit Desrosiers, président et concepteur. Il cite en exemple les rayons du soleil, qui, s’ils plombent au bon endroit, chauffent les maisons en hiver. Bref, si plusieurs équipements permettent d’ajouter une touche de vert aux résidences, ce sont souvent de petits gestes simples, mais réfléchis, qui font une différence.
Mais surtout, il faut penser en termes de « cycle de vie », c’est-à-dire en examinant l’empreinte écologique d’un édifice de sa construction à sa destruction, précise Hugo Lafrance. « De plus en plus, on analyse également l’impact des bâtiments sur la santé humaine, en vérifiant différents éléments, comme la présence de radon dans le sol », cite-t-il en exemple. Des tendances à surveiller !
La vie en vert
Bâtir une maison écologique, ça se planifie. Si certaines mesures coûtent plus cher à mettre en place, plusieurs petits gestes peuvent avoir de grands impacts. Quelques idées inspirantes.
Championnes de l’économie d’énergie
S’il existe plusieurs définitions de la maison écologique, toutes sont ultra-performantes au point de vue énergie. « L’efficacité du bâtiment est très importante et il faut aller au-delà des normes, notamment quant à l’isolation, l’étanchéité ou en éliminant les ponts thermiques, indique Claire Sirois, directrice du créneau d’excellence ACCORD Écoconstruction. Thermostats intelligents, appareils à faible consommation, système de chauffage bien pensé, portes et fenêtres efficaces : des équipements plus chers à court terme, mais qui ont un impact à long terme », poursuit-elle.
La superficie de la résidence pèse aussi lourd dans la balance. C’est pourquoi, sans tomber dans la mini-maison, le concepteur de la firme Diago architecture et design, Benoit Desrosiers, fait un effort pour que chaque centimètre soit optimisé pour répondre aux besoins de l’occupant. « C’est possible d’agrandir en rapetissant, c’est-à-dire en réfléchissant bien l’espace, par exemple en bougeant un escalier ou encore en ajoutant des rangements à même les murs, comme on le faisait à l’époque de nos grands-mères », décrit-il.
Énergie naturelle
En apparence anodin, le choix du terrain – et surtout la position du bâtiment – peut faire toute une différence. L’utilisation de la lumière naturelle, du vent, de la chaleur du soleil et de l’ombre sont autant d’éléments pouvant améliorer le bilan environnemental d’une maison, sans faire grimper le budget, ajoute Benoit Desrosiers. « De cette façon, les maisons ne coûtent presque rien à chauffer l’hiver », affirme pour sa part Marie-France Thibodeau, directrice générale de la firme Diago.
En plus de prévoir une masse thermique pour emmagasiner l’énergie, il faut réfléchir à la disposition des pièces en fonction de l’ensoleillement. Un principe qui a aussi guidé ADHOC architectes dans son projet La Géode. Ce multiplex montréalais a été conçu pour limiter la profondeur des pièces, avec une cour intérieure, et profiter au maximum de la lumière et du vent, explique Jean-François St-Onge, architecte et cofondateur de la firme. Installé en pleine ville, l’édifice permet également de limiter l’étalement urbain en augmentant la densité. « Nous sommes sur un terrain censé accueillir un triplex, mais notre immeuble compte cinq unités », précise-t-il.
Des matériaux bien choisis
© Diago architecture et design
« Pour être écolo, il vaut mieux mettre l’accent sur des matériaux durables, explique Claire Sirois. Il peut être tentant d’installer du vinyle comme revêtement parce que ce n’est pas cher. Mais des matériaux comme le bois sont beaucoup plus durables. Par exemple, après une vingtaine d’années, on peut le repeindre plutôt que de le jeter. Et, au final, on peut le recycler ou le réutiliser. Sans compter que le Québec est un important joueur au niveau forestier, ce qui diminue le transport tout en fortifiant l’économie locale. Autre avantage : l’utilisation de bois, qui se décline sous de multiples formes, permet de diminuer ses émissions de gaz à effet de serre (GES) en séquestrant le carbone », ajoute-t-elle.
Il existe aussi une multitude de possibilités plus écologiques que les produits traditionnels, comme des isolants de chanvre ou de cellulose soufflée, affirme Claire Sirois. Ces produits, souvent québécois, sont fabriqués de matière naturelle, renouvelable et généralement recyclable ou réutilisable, ce qui améliore leur bilan environnemental. Même chose si on réutilise des produits.
Penser à demain
Si le projet La Géode n’est pas équipé pour produire sa propre énergie solaire, il est « solar ready », c’est-à-dire que tous les conduits pour s’alimenter à cette source sont installés, indique Jean-François St-Onge. Car si cette technologie coûte encore cher, elle se démocratisera au cours des années, prévoit-il. « L’idée, c’est de planifier pour l’avenir. » Un exemple qui peut également s’appliquer aux différentes énergies renouvelables, aux terrasses vertes, aux stationnements pour voitures électriques ou même aux rénovations futures. « Choisir des luminaires qu’il est possible de réparer ou de recycler plutôt que ceux qui sont scellés est une autre façon de mieux utiliser ses ressources », poursuit-il. Opter pour des matériaux bruts, comme le bois et l’acier, à l’abri des modes, prolonge aussi leur durée de vie, plaide quant à lui Benoit Desrosiers. « Je tente aussi de respecter la grandeur standard des matériaux pour diminuer les rebuts. Ce qui rend aussi les rénovations plus faciles ensuite. »
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Autre tendance : les écocommunautés, c’est-à-dire lorsque plusieurs décident de partager un terrain pour y habiter. Une option intéressante puisqu’elle permet non seulement de diminuer la pression financière des occupants, mais aussi leur empreinte écologique, explique Benoit Desrosiers. « Nous travaillons actuellement sur notre premier projet de ce genre, où deux maisons seront construites sur le même terrain, ce qui améliore l’utilisation des lieux ! » Une façon de créer des espaces communs – comme la cour – et de partager du matériel, comme la tondeuse, la perceuse, etc.
Une philosophie qu’on peut également retrouver dans les projets plus urbains, ajoute Jean-François St-Onge. Il cite en exemple l’installation d’un chauffe-eau central permettant de fournir plusieurs unités. « Les chaudières communes sont non seulement plus performantes, mais aussi plus durables. Plutôt que de devoir les changer tous les 10 ans, comme le demandent les assurances, on peut tout simplement les réparer. » Autres idées : plusieurs immeubles incluent maintenant des espaces dédiés à l’autopartage, ateliers de réparation de vélos ou lieux modulables selon les besoins. Autant de façons de mutualiser ses ressources !
Certifié écolo
Alors que plus de 3200 édifices ont été certifiés LEED depuis 2005 au Canada, c’est certainement la certification la plus connue. Mais, il existe plusieurs normes permettant d’attester du caractère durable d’un bâtiment. Quatre exemples à découvrir !
Maison passive
« Cette norme, qui s’intéresse à l’efficacité, met de l’avant le fait que l’architecture peut favoriser l’autonomie énergétique. Par exemple, le soleil devrait pouvoir combler l’essentiel de nos besoins de chauffage l’hiver et le couvert végétal protéger la maison en été », explique Hugo Lafrance. Une grande attention est donc portée sur des détails comme la volumétrie, la configuration, l’étanchéité et l’isolation. Une fois terminées, ces habitations consomment entre 80 et 90 % moins d’énergie que leur équivalente traditionnelle. Bien qu’encore rares au Québec, ce type d’immeuble peut être certifié Passivhaus, par un organisme allemand, ou PHIUS, aux États-Unis (voir aussi l’article Passivhaus ou maison passive, publié sur ACQConstruire, le 14 janvier 2019).
Net-Zéro
Les bâtiments Net-Zéro consomment autant d’énergie qu’ils en produisent. « Si on voulait imager le tout, on imaginerait un compteur qui, à la fin de l’année, serait à zéro », illustre Hugo Lafrance. Pour obtenir cette certification, il faut non seulement miser sur la performance, mais aussi sur l’installation d’équipements de production d’énergie renouvelable, comme des éoliennes ou des panneaux solaires.
Carbone-zéro
Pour lutter contre les changements climatiques, il faut s’attaquer aux gaz à effet de serre (GES). Au Canada, 17 % de ces émissions proviendraient des immeubles. C’est d’ailleurs pourquoi le Conseil du bâtiment durable du Canada vient tout juste de lancer la norme « Carbone-zéro ». « Pour obtenir cette certification, il faut non seulement évaluer la quantité de GES émis pour opérer l’immeuble, mais aussi faire un bilan carbone intrinsèque des matériaux utilisés pour la construction », indique Hugo Lafrance. Pour compenser, les édifices devront ensuite fournir de l’énergie renouvelable et propre, produite sur place ou financée hors site.
WELL
« On réalise que, bien souvent, ce qui est bon pour la santé de la planète l’est aussi pour les humains », constate Hugo Lafrance. C’est la raison d’être de la certification WELL, développée par l’International Well Building Institute, qui tient compte également du bien-être des occupants d’un bâtiment. « L’exemple le plus emblématique de cela, c’est l’utilisation de produits sans COV [composés organiques volatils], comme la peinture. Mais cela va beaucoup plus loin », explique celui qui travaille sur Humaniti, un des premiers projets visant cette certification au Québec. Cette « communauté verticale évoluée » propose unités d’habitation, bureaux, commerces et autres, en mettant l’accent sur des éléments comme la qualité de l’air, de l’eau, de l’alimentation, l’intégration de végétaux, etc. (voir aussi l’article La certification WELL : l’humain au coeur du bâtiment, publié sur ACQConstruire, le 16 mai 2018).
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