Photos : Groupe NH Photographes – Normand Huberdeau
« J’ai vu construire et démolir l’usine de magnésium Norsk-Hydro à Bécancour. »
François-Mario Lessard, Direction des relations du travail de l’ACQ
Il a connu de longues journées à négocier les conventions collectives des salariés des secteurs IC/I en prenant part à 7 rondes de négociations depuis 1995. François-Mario Lessard, de la Direction des relations du travail de l’ACQ, quittera bientôt ses fonctions pour une retraite bien méritée.
Bachelier en relations industrielles de l’Université de Montréal, François-Mario Lessard a commencé sa carrière à la STCUM, devenue la STM en 2002. « C’est là que j’ai appris la procédure de griefs avec les nombreux syndicats, dont ceux des chauffeurs d’autobus et de métro et des employés d’entretien. Pour moi, ce travail a été une véritable école de formation. »
Directeur régional de l’AECQ
Et puis, le temps d’une négo à la Papeterie canadienne de Joliette – vous savez, celle qui produisait les fameux cahiers Hilroy Canada –, le jeune diplômé en relations du travail prend la direction de Trois-Rivières où on lui propose le poste de directeur régional de l’AECQ (Association des entrepreneurs en construction du Québec). Il a été un proche témoin de la construction de la centrale nucléaire Gentilly II en 1983 et de l’usine d’eau lourde LaPrade à Bécancour. « J’ai aussi vu construire l’usine de magnésium Norsk-Hydro durant les années 80 et sa démolition en 2009 », évoque avec un brin de nostalgie M. Lessard. Il se souvient des nombreuses rencontres avec des employeurs et des fréquentes interventions du gouvernement dans le processus de négociation au nom de l’intérêt public. C’est aussi à cette époque qu’on assiste à la déréglementation dans le secteur résidentiel, et pour le représentant de l’AECQ, la loi 142 n’était pas nécessairement une bonne nouvelle.
La loi 46
Mais s’il est une législation qui revêt une grande importance pour lui, c’est bien la loi 46 qui, en 1995, a permis à l’ACQ d’exercer le mandat de négociation et des relations du travail pour les employeurs œuvrant dans les secteurs IC/I : « Cette même loi abolissait les décrets, lesquels sont remplacés par les conventions collectives sectorielles, négociées par les associations sectorielles d’employeurs et les associations syndicales. La loi 46 responsabilisait, en somme, les parties négociatrices. »
Relations du travail à l’ACQ
À l’AECQ, son rôle consistait à représenter les employeurs de la région de la Mauricie en matière de relations du travail. Il franchira une nouvelle étape dans sa carrière en devenant directeur adjoint aux relations du travail à l’ACQ en 1995 et directeur 5 ans plus tard. François-Mario Lessard se retrouvera alors à négocier aux côtés de son inséparable collègue, Lyne Marcoux, négociatrice en chef (Isolation Lamar). Avant d’entamer une première ronde de négociation, les porte-paroles des associations patronales et syndicales ont suivi ensemble une formation pour se familiariser avec les principes de la négociation raisonnée. « Nous avons même fait des simulations supervisées par deux professeurs de relations du travail de l’Université du Québec à Chicoutimi », se souvient M. Lessard.
Les ententes conclues avec la partie syndicale ont représenté d’importants gains pour les employeurs : « Je pense notamment aux plages horaires, à la possibilité d’effectuer des travaux d’entretien ou de rénovation sur des bâtiments commerciaux, institutionnels et industriels terminés sans avoir à payer d’heures supplémentaires, à l’abolition des primes improductives dans le secteur industriel (industrie lourde) ou encore à l’augmentation des distances conférant le versement d’une indemnité pour frais de déplacement. Notre régime de relations du travail a permis la conclusion de 14 conventions collectives. Nous avons connu un seul conflit de travail en 2013. Je considère que nous avons une assez bonne moyenne depuis l’abolition des décrets. »
Régime de retraite déficitaire
Un autre dossier majeur a retenu l’attention lors la négociation en 2004. Patrons et syndicats ont alors été confrontés à un déficit de 2 milliards de dollars au régime de retraite : « Nous avons sauvé le régime en instaurant un régime à cotisations déterminées au lieu d’un régime à prestations déterminées. Le déficit sera totalement épongé en 2019 et on pourra même compter sur un fonds de réserve pour faire face aux soubresauts de l’économie. »
La loi 33 sur le placement syndical constitue un autre point marquant des gains obtenus par l’ACQ. « Nous devions mettre fin à l’intimidation sur les chantiers et redonner le droit de gérance aux employeurs dans le processus d’embauche. » Autre élément important de cette loi : la réévaluation par la Commission de la construction du Québec de la définition des métiers. « Notre industrie doit revoir la définition des métiers à la lumière des pratiques établies en y intégrant également les nouvelles technologies et en favorisant les juridictions partagées », insiste le futur retraité, très satisfait de tout ce qui a été accompli pour améliorer la productivité et les conditions de travail des salariés. D’ailleurs, il ne quitte pas définitivement l’organisation puisqu’il agira comme conseiller à l’équipe de négociation de l’ACQ, au cours des prochains mois.
Et maintenant que l’heure de la retraite a sonné, François-Mario Lessard ne sera donc pas inactif. « Je vais m’inscrire à l’Université du troisième âge pour suivre des cours d’histoire et de géopolitique. » Des projets de voyage ? Sans doute l’Espagne !