La réception des parties communes selon les règles de droit ou ... l'équité

La réception des parties communes selon les règles de droit ou ... l'équité
Mathieu Préfontaine, avocat, Bélanger Paradis avocats
Mathieu Préfontaine, avocat, Bélanger Paradis avocats
Chroniqueur Juridique

En application du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs1, la garantie d’un plan relative aux bâtiments détenus en copropriété divise (condominiums) doit couvrir, entre autres choses, la réparation des malfaçons, des vices cachés et des vices de conception, de construction, de réalisation et/ou de sol.

S’il est vrai que ces garanties ont un objectif commun – à savoir la qualité des travaux réalisés par l’entrepreneur - elles se distinguent notamment par leur date d’entrée en vigueur. Alors que le départ des garanties offertes contre les malfaçons non apparentes et les vices cachés débutent au moment de la réception, la garantie contre les vices de conception, de construction, de réalisation et/ou de sol débute, quant à elle, à la fin des travaux.

Compte tenu de ce qui précède, il va sans dire qu’il est dans l’intérêt de l’entrepreneur que la réception des parties communes se fasse avec célérité, et ce, afin de marquer le point de départ des garanties offertes contre les malfaçons non apparentes et les vices cachés.

En principe et suivant les termes du Règlement, la réception des parties communes doit être faite conjointement par l’entrepreneur, le professionnel du bâtiment choisi par le syndicat de copropriété (ou le « syndicat ») et ce dernier2.

Bien que l’entrepreneur ait tout intérêt à procéder à la réception des parties communes dans les meilleurs délais, il appert que la réception des parties communes repose sur le syndicat, qui devra, suivant les termes du Règlement, mandater un professionnel du bâtiment pour ce faire. Il est en effet de jurisprudence constante que l’entrepreneur ne peut pas mandater lui-même ledit professionnel.

Dans ces circonstances et afin de responsabiliser le syndicat et de limiter les garanties dans le temps, le Règlement intègre également la notion de « réception présumée » selon laquelle la réception des parties communes par le syndicat est présumée lorsque les conditions suivantes sont remplies :

  • Les travaux sont terminés;
  • Le syndicat est formé et n’est plus sous le contrôle de l’entrepreneur;
  • L’avis de fin de travaux transmis au syndicat, au moment où ce dernier n’est plus sous le contrôle de l’entrepreneur, l’informait de la fin des travaux et de ses obligations en regard de la réception; et
  • Il s’est écoulé un délai de 6 mois depuis la réception de cet avis par le syndicat et ce dernier, sans motif, n’a pas reçu les parties communes3.

Cela dit, l’omission de l’entrepreneur de transmettre l’avis de fin de travaux au syndicat ou encore l’absence de preuve de remise et/ou de réception de l’avis de fin de travaux permettent-elles au syndicat qui tarde à recevoir les parties communes de se réfugier derrière cette omission et une interprétation stricte du Règlement afin de prolonger indûment, de plusieurs années, les délais des garanties inhérentes aux malfaçons non apparentes et aux vices cachés ?

Selon une jurisprudence arbitrale qui nous apparaît constante, la réponse à cette question doit être négative.

En effet, les tribunaux d’arbitrage ont déterminé que pour éviter une situation inéquitable à l’égard d’une partie – ce qui inclus l’entrepreneur et, à plus forte raison, l’administrateur, l’arbitre est justifié, dans certaines circonstances, de faire appel à la notion d’équité prévue à l’article 116 du Règlement et d’établir la date de réception des parties communes en « équité » en considérant notamment le concept d’habitabilité de l’immeuble (soit la date à laquelle le bâtiment est en état de servir à l’usage auquel on le destine), la date du transfert de contrôle du syndicat et la date de la première assemblée des copropriétaires.

En terminant et bien que les tribunaux d’arbitrage ont statué que le recours à la notion d’équité prévue par le Règlement peut s’appliquer en faveur de l’entrepreneur et de l’administrateur du plan de garantie et permettre, dans certaines circonstances, de fixer la date de réception des parties communes en équité alors que le syndicat tarde, sans motif, à procéder à la réception des parties communes, il est utile de rappeler que l’entrepreneur a tout intérêt à collaborer avec le syndicat afin de procéder à la réception des parties communes conjointement avec ce dernier, et ce, dans les meilleurs délais.

1 Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, RRQ, c B-1.1, r 8.

2 Article 33 du Règlement.
3 Article 25.1 du Règlement.

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