Attention au radon et autres gaz souterrains !

Attention au radon et autres gaz souterrains !
Paul Demers
Paul Demers
Chroniqueur Technique

L’ensemble des composantes de nos constructions est issu de la nature qui, elle, se présente à l’état solide, liquide ou gazeux. Nos sols sont fertiles et ce, à bien des égards même les plus malveillants puisque mis à part les masses de roc, de terre ou d’eau, ils peuvent  dissimuler des gaz tels que l’azote, le dioxyde de carbone, l’oxygène, le méthane et le radon. Nos bâtiments doivent donc être munis de barrières en guise de protection contre les gaz souterrains pour préserver la santé des occupants des bâtiments.

Protéger quoi ?

Si vous avez eu l’expérience d’assister à une excavation printanière pour une construction, vous avez probablement remarqué des ruissellements d’eau parfois importants ou possiblement des odeurs marquantes dévoilant la présence de gaz dans le sol. Au Code de construction du Québec Ch. 1- bâtiment, à l’alinéa 5.4.1.1.e) on mentionne qu’un ensemble de construction séparant un espace climatisé de l'extérieur ou un espace intérieur d’un sol adjacent, doit contrôler les fuites d'air ou permettre la ventilation vers l'extérieur, de façon à réduire au minimum les infiltrations de radon à partir du sol dans le but de maintenir la concentration de radon à l'intérieur à un niveau acceptable.

À la section 9.13., on traite de la protection contre l’humidité, l’eau et l’infiltration des gaz souterrains. Cette protection s’applique aux murs situés sous le niveau du sol, aux planchers sur sol, et selon le cas, à des toits qui sont en contact avec le sol. Cette protection se doit d’être appliquée en continu par l’application d’enduits, d’émulsions ou de membranes pour la protection contre l’humidité et si en présence de pression hydrostatique élevée, par imperméabilisation et cuvelage de façon à enrober les parties du bâtiment qui sont en contact avec le sol. Ces protections exercent du même coup une barrière à la volatilité des gaz présents aux abords de nos bâtiments. L’aspect volatil des gaz impose des attentions particulières du fait qu’ils peuvent être transportés par les mouvements d’air présents dans nos espaces de vie et devenir malsains pour l’humain.

Ennemi furtif

La pression d’air intérieur d’un bâtiment est habituellement inférieure à celle du sol environnant les fondations. Cet écart de pression favorise une aspiration de l’air et des gaz souterrains contenus dans le sol, dont le radon, par les fissures et ouvertures des fondations en contact avec le sol. Le radon est issu de l’uranium qui est un élément radioactif naturel présent partout dans les roches et les sols. L’uranium, lors de sa désintégration radioactive, produit du radium qui à son tour se désintègre en radon, un gaz inerte, radioactif incolore et inodore. Le radon peut s’échapper facilement de la partie rocheuse du sol et de l’eau souterraine vers l’air extérieur ou même s’infiltrer dans un bâtiment. Le radon infiltré dans un environnement fermé peut occasionner un accroissement de sa concentration moyenne annuelle pouvant dépasser les limites jugées acceptables par Santé Canada. Si tel est le cas, des mesures d’atténuation des gaz doivent être mises en place dans le bâtiment.

Tolérance

Le gouvernement du Québec et l’Association pulmonaire du Québec ont une cible équivalente à la ligne directrice canadienne sur le radon, établie par Santé Canada ciblant le seuil d’alerte à 200 becquerels par mètre cube (Bq/m³), pour la concentration de radon dans l’air intérieur des espaces normalement occupées d’un bâtiment. Donc, à l’atteinte de celle-ci, il est recommandé d’intervenir et d’adopter des mesures d’atténuation dans un environnement encloisonné.

Mesurer la concentration du radon

Il est simple et peu coûteux de mesurer la concentration de radon.

Santé Canada recommande une période de mesure d’au moins trois mois dans un bâtiment, de préférence entre les mois d’octobre et d’avril. La mesure devrait être prise au cours du premier hiver suivant l’occupation des lieux, puis tous les cinq ans.

Le constructeur pourrait vous avoir fourni une trousse de mesure du radon approuvée par le PNCR-C au moment d’emménager. La mesure du radon peut être facilement effectuée par le propriétaire à l’aide de détecteurs spéciaux offerts dans les entreprises commerciales, les centres de rénovation, certaines municipalités et associations pulmonaires provinciales.

Ces appareils doivent être placés chez vous, être exposés à l’air intérieur pendant une période donnée, puis renvoyés à l’entreprise aux fins d’analyse. Certaines entreprises envoient un technicien qualifié sur place pour effectuer la mesure.

Ces appareils peuvent être de type rapide à court terme comme le détecteur à charbon actif, ou plus standard comme le détecteur de traces ALPHA (A), le détecteur par chambre d’ionisation (B), et les moniteurs numériques (C) dont certains sont en lecture continue et qui, pour l’instant, ne sont pas reconnus par Santé Canada.

A B C

 Parle, parle ! Jase, jase !

  • Le radon est la principale cause de cancer du poumon chez les non-fumeurs.
  • Le radon est la deuxième cause de cancer du poumon après le tabagisme.
  • L’exposition à des concentrations élevées de radon augmente le risque de cancer du poumon.
  • Le risque de cancer dépend de la concentration de radon et de la durée de l’exposition.
  • Tous les sols contiennent de l’uranium, le radon est donc présent dans tous les types de sol et dans toutes les régions.
  • Selon l’Association pulmonaire du Québec, 17 % des demeures québécoises mesurées dépassent la directive nationale sur le radon.
  • Dans une rue, un seul bâtiment pourrait être, ou ne pas être touché par une concentration élevée du radon.

Niveaux d’atténuation du radon 

Selon le résultat obtenu à l’aide du détecteur (dosimètre), si la lecture est jugée trop élevée, trois types d’assemblages ou niveaux d’atténuation sont recommandés pour diminuer la concentration du radon dans un bâtiment selon les normes :

CAN/CGSB-149.11-2019 : MESURES D’ATTÉNUATION DU RADON DANS LES MAISONS ET PETITS BÂTIMENTS NEUFS.
Et, CAN/CGSB-149-12-2017 : MESURES D’ATTÉNUATION DU RADON DANS LES MAISONS ET PETITS BÂTIMENTS EXISTANTS.

Ces normes sont reconnues être la référence en guise de bonne pratique sans en être une loi contrairement au Code de construction du Québec 2015.

Dépressurisation NIVEAU 1 

La captation

Au Code de construction du Québec Ch. 1- bâtiment, l’article 9.13.4.3. Mise en place des moyens pour un système de dépressurisation sous le plancher, on mentionne que dans les nouveaux bâtiments, les planchers sur sol doivent comporter les moyens nécessaires à la future mise en place d'un système complet de dépressurisation sous le plancher comprenant, une couche perméable aux gaz comme une couche de matériau granulaire propre permettant au gaz de circuler et d’atteindre l’embouchure de canalisation de 100 mm (4 po) de diamètre pour la captation sous la dalle et une sortie d'air au-delà de la dalle pour y adapter une canalisation future (Niveau 2) au moment propice et si non requis, boucher l’orifice à l’aide d’un couvercle hermétique et identifié RADON. Cette captation doit pouvoir s’exercer le plus au centre de possible de chaque périmètre fermé par des semelles et à chacun des niveaux d’une fondation.

Si bâtiment existant Si bâtiment neuf

Dépressurisation NIVEAU 2 

Évacuation passive

La dépressurisation de niveau 2 s’exerce en continuité des installations de niveaux 1 sans être une obligation si non en présence de concentration  de radon l’exigeant. Il s’agit d’un réseau de canalisation de 100 mm (4 po) de diamètre qui, naturellement, par effet de cheminée, contribuera à évincer les gaz vers l’extérieur en partie supérieur du bâtiment. À partir de l’orifice d’évacuation, les dégagements minimums suivants doivent être respectés :

  • 300 mm (12 po) avec la pénétration au toit.
  • 900 mm (36 po) avec une prise d’air (entrée) mécanique
  • 600 mm (24 po) vertical avec une porte ou une fenêtre
  • 3 m (10 pi) horizontal avec une porte ou fenêtre
  • 3 m (10 pi) horizontal avec un mur dépassant la pénétration au toit.

Pour un système passif, le réseau vertical peut être composé de changements d’angles de 22,5° maximum. Lorsqu'il monte à l’intérieur des espaces climatisés, il ne requière pas d’isolation. On devra isoler la partie traversant des espaces non climatisés comme les vides sous toit. Le réseau doit être hermétique, être identifié par intervalle de 1,8 m (6 pi) ou lors de changement de direction et faire l’objet test d’étanchéité avant la mise en service. 

Dépressurisation NIVEAU 3 

Évacuation active 

La dépressurisation de niveau 3 s’exerce en continuité des installations de niveaux 1 et 2 par l’ajout d’un ventilateur conforme à la norme CSA-C22.2 n° 113, étanche, de type centrifuge fonctionnant en continu, produisant une différence de pression et entraînant par le fait même l’aspiration du radon logé sous le bâtiment et entraînant son rejet à l’extérieur. Un système actif de réduction du radon peut évacuer de trois façons différentes. Sur le toit, par un mur pignon ou au niveau du sol, par un mur extérieur. Cela implique le respect de dégagements le cas échéant. Un système actif peut servir à réduire la concentration de radon présente dans la région sous la dalle ou un vide sanitaire en terre battue. Le niveau 3 permet de réduire les concentrations de radon importantes dans l’air intérieur et un indicateur de performance du système doit être installé à l’intérieur, à un endroit visible pour les occupants. Cet indicateur permet de surveiller l’efficacité du ventilateur et affiche la pression d’aspiration dans la tuyauterie de la colonne d’évacuation.

Objectif

Les émanations de gaz à l’intérieur de bâtiment peuvent être réduites en favorisant l’application de mesures d’atténuation du radon selon des niveaux adaptables à la concentration du gaz radon en présence dans un espace encloisonné. L’objectif « 0 » en continu est difficilement atteignable puisqu’il s’agit d’un contexte naturel environnant nos bâtiments et que seule l’élimination en pourcentage de volumes d’air nous permet de maîtriser le niveau de concentration tolérable du radon en dessous de 200 becquerels par mètre cube (Bq/m³) tel que la ligne directrice canadienne sur le radon le recommande.

Au fil du temps

Réno

Les travaux de rénovation, y compris de simples percements pour la plomberie ou des agrandissements effectués au bâtiment, peuvent modifier la concentration de radon dans l’air intérieur. Pour de tels cas, une mesure de la concentration de radon devrait être effectuée.

Tuyaux
La tuyauterie exposée (non protégée) doit être inspectée plusieurs fois par année pour déceler tout dommage.

Siphons
Des siphons ou d’autres dispositifs devraient être installés sur les drains d’appareils pour empêcher l’infiltration de gaz souterrains. Les siphons devraient être remplis périodiquement pour remplacer l’eau évaporée.

Ventilateurs
Les ventilateurs de radon des systèmes actifs NE devraient JAMAIS être éteints. S’ils sont éteints, le système ne fonctionnera plus comme prévu. Leur coût de remplacement varie généralement entre 200 $ et 300 $, en plus du coût de la main-d’œuvre requise.

Vente
Au moment de la vente du bâtiment, la trousse d’information devrait demeurer sur place pour permettre aux nouveaux propriétaires de s’y référer.

À consulter

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