Dossier relève d’entreprise : Réussir la relève de son entreprise

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Photo page d’accueil : Marcel, Anne-Marie et Charles Demers, copropriétaires de J.M. Demers. Crédit photo : J.M. Demers
Photo introduction : Les frères Dany et Yanick Tremblay, respectivement président de Démex et de Centrem, Bernard Tremblay, vice-président de Centrem et Nicolas Guay, chef estimateur de Démex. Crédit photo : Démex

S’il y a une étape cruciale dans la vie d’une entreprise, c’est bien celle de la relève. Des conseils pour la mener avec succès.

Au Groupe Demex, on pourrait presque dire que la relève se prépare depuis la fondation de l’entreprise… en 1992. À l’époque, les frères Yannick et Dany Tremblay se sont associés à leur père Denis et à trois autres actionnaires pour créer la PME spécialisée en démolition, excavation et recyclage de Saguenay. Alors dans la vingtaine, ils avaient déjà l’ambition de prendre la suite des choses au départ du dirigeant.

Le vrai processus de relève a été enclenché en 2010 pour aboutir en 2015 alors que les deux frères ont pris les rênes de l’entreprise avec leur oncle, Bernard Tremblay. Leur présence depuis les débuts de la PME a fait en sorte qu’ils étaient bien préparés à assurer la direction de Demex, qui est aujourd’hui une des trois plus importantes entreprises de démolition au Canada.

Cinq années ont été nécessaires pour préparer le relais. « Comme première étape, il a fallu procéder à une évaluation de l’entreprise, mesurer les forces en présence, identifier les domaines où il y avait place à l’amélioration », explique Yannick Tremblay, président de Centrem, la société soeur de Demex, spécialisée en recyclage. Cédants et releveurs ont été accompagnés dans la démarche par une firme de comptables et fiscalistes, le Groupe Mallette. Ces experts ont aidé les Tremblay à prendre les bonnes décisions au bon moment.

Des sujets sensibles

Dans les cas de transfert familial, la mise sur pied d’un conseil de famille est souvent recommandée. Cette structure de gouvernance permet d’avoir un lieu pour discuter des différents enjeux de la relève sans nuire aux opérations… ni perturber les soupers de famille ! Les Tremblay n’ont toutefois pas senti le besoin de se doter d’un tel forum. « Cela faisait plus de 20 ans qu’on travaillait ensemble et les discussions ont toujours été faites dans le respect des gens et de la hiérarchie », explique Dany Tremblay, président de Demex.

Si tout s’est passé sans anicroche, il y a quand même eu des moments plus délicats à traverser, notamment quand il fallait parler de l’aspect financier de la transaction. « En plus de mon père, un autre associé (son oncle Reynald) a décidé de céder ses parts. On aurait préféré ne pas avoir à les racheter en même temps », raconte Dany Tremblay. La situation exigeait de trouver une structure financière qui permettrait aux releveurs de financer la transaction tout en se gardant une marge de manœuvre pour poursuivre le développement de l’entreprise. C’est Desjardins Capital, par le biais du Fonds Capital Croissance PME, qui a apporté la solution. Un financement de 1,7 million de dollars sous forme d’équité et de dette subordonnée a permis aux trois associés de procéder au rachat des actionnaires fondateurs.

Une relève assurée

Desjardins, qui était déjà un des partenaires financiers du Groupe Demex, a fourni un accompagnement aux releveurs grâce au réseau d’experts de son Centre Desjardins Entreprise à Saguenay. Le prêteur a aussi exigé la création d’un conseil d’administration, une demande que les Tremblay ont accueillie avec ouverture. Deux administrateurs provenant d’un autre domaine que la construction siègent au nouveau conseil.

« Partager l’actionnariat n’est pas toujours aussi bien reçu par les dirigeants, soutient Jean Bergeron, directeur Investissement chez Desjardins Capital. Si elle peut déranger au début, la présence du CA est vite perçue comme un atout quand les releveurs réalisent la valeur que le CA peut apporter à l’entreprise ». « Ces actionnaires apportent une expertise qui est différente de la nôtre. Cela nous aide à prendre les meilleures décisions », indique Dany Tremblay.

Pour Demex, cet appui est d’autant plus essentiel que l’entreprise, qui compte quelque 200 employés, est sur une lancée. Récemment, la PME a remporté coup sur coup des contrats majeurs pour la démolition de l’Hôpital Saint-Luc et de l’Hôpital pour enfants de Montréal. Elle a aussi obtenu son plus important contrat à vie (25 M$) pour la démolition de 600 cuves à l’aluminerie Kitimat, en Colombie-Britannique. Depuis deux ans, le chiffre d’affaires est en forte croissance (25 %) et les nouveaux dirigeants ont plusieurs projets dans leur carton, dont celui de poursuivre l’expansion à l’extérieur des frontières du Québec.

Un gage de réussite

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Vincent Lecorneprésident-directeur général du Centre de transfert d’entreprise du Québec. Crédit photo : CTEQ

L’exemple de Demex démontre bien que se faire accompagner durant le processus de la relève est un gage de réussite. Différents experts peuvent aider dans le processus, que ce soit un conseiller externe ou les professionnels liés à l’entreprise (banquier, comptable, avocat ou notaire).

Selon Vincent Lecorne, président directeur général du Centre de transfert d’entreprise du Québec (CTEQ), les entrepreneurs sont mieux informés qu’avant sur les différents aspects du transfert et plus conscients de l’importance de bien s’y préparer. Cela dit, il n’est pas toujours facile de passer de la parole aux actes. C’est là où le conseiller joue un rôle essentiel. « La relève, il faut la prioriser dans son quotidien, affirme M. Lecorne. Le dirigeant doit poser des gestes concrets pour faire avancer le dossier. Cette étape doit être vue comme une occasion d’affaires stratégique alors que, souvent, elle est perçue plus négativement en raison de l’enjeu humain. En effet, qui a envie de planifier sa sortie ? »

Il faut de trois à cinq ans voire plus pour bien préparer le transfert de son entreprise. En cours de route, les dirigeants font face à plusieurs défi s qui exigent attention et réflexion. Qui sera le meilleur candidat pour prendre le relais ? Quel sera le rôle de chacun des repreneurs ? Comment, à qui et à quel moment communiquer son intention de céder sa place ? Est-ce que l’entreprise est à son plein potentiel de croissance ? Faut-il investir pour augmenter la capacité de production ou diversifier la clientèle pour la rendre plus attrayante aux yeux d’un acheteur ? Comment établir sa juste valeur marchande ? De quelle façon financer le transfert de propriété ? La liste des sujets à discuter est longue…

« Il n’y a pas de recette toute faite. Chaque entreprise doit trouver son modèle de relève à travers une infinie possibilité de formules, soutient M. Lecorne. L’important, c’est de trouver la solution qui est gagnante pour toutes les parties prenantes de l’entreprise de façon à assurer sa pérennité. »

J.M. Demers passe à la troisième génération

Anne-Marie Demers et son frère Charles sont maintenant aux commandes de J.M. Demers, spécialisée en excavation. Elle est propriétaire de l'entreprise de Lévis à parts égales avec son frère et son père Marcel, qui continue de jouer un rôle en travaillant sur les chantiers. Sa mère, Lyne Carrier, quant à elle, a décidé de prendre sa retraite il y a trois ans.

Le processus de transfert s’est étalé sur cinq ans. Qu’en retient Anne-Marie Demers ? « L’aspect fiscal a été relativement facile à traiter. Il en est autrement du côté émotionnel, explique la directrice générale. En tant que relève, il faut apprendre à faire sa place. Le cédant, lui, doit réaliser que les choses seront faites différemment. On ne gère pas de la même façon et on veut faire évoluer l’entreprise. »

La famille a été accompagnée par un coach qui les a aidés à aborder les différents aspects du transfert, à exprimer leurs idées et aussi leurs craintes. « Il nous aidait à enlever la part émotive lors des discussions, ajoute Mme Demers. Sa présence a aussi rassuré les employés que le transfert serait fait dans le respect. »

Les Demers ont pris soin de choisir un coach avec qui ils se sentaient à l’aise. « On a passé une entrevue avec trois consultants de la région avant de faire notre choix. »

Frère et sœur sont bien en selle. Une nouvelle division a été créée qui offre des services d’aménagement extérieur. « On vise une intégration verticale de nos services. On est rendu là », explique Mme Demers. La croissance est au rendez-vous. En cinq ans, J.M. Demers est passée de 45 à 70 employés.

Quelques ressources utiles

CTEQUEBEC.COM
Le CTEQ offre les services de consultants qui sont présents dans la plupart des régions du Québec. Ils accompagnent autant les cédants que les repreneurs. Le CTEQ organise aussi des événements et des formations sur les différents aspects de la relève. De plus, l’organisme propose L’Index, une plateforme de recherche qui recense des cédants, des repreneurs potentiels et des experts.

DU RÊVE À LA RELÈVE
Le site de la Chaire de développement et de relève de la PME fourmille d’informations. Il propose aussi une liste de questions fondamentales pour les cédants et les repreneurs qui aident à la réflexion.

INFO-ENTREPRENEURS
Comprend une section sur la relève et le transfert d’une entreprise. Il suffit de taper « Relève et acquisition » dans la bande de recherche pour trouver de l’information, une liste de formations et d’organismes qui peuvent aider les dirigeants à préparer leur relève.

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