Coupable ? Oui, mais non. Les limites du pouvoir de l'AMP

Coupable ? Oui, mais non. Les limites du pouvoir de l'AMP
Maria Cristina Argento, avocate
Maria Cristina Argento, avocate
Chroniqueur Juridique

Toute entreprise qui souhaite conclure un contrat public ou un sous-contrat qui en découle doit obtenir une autorisation de l’Autorité des marchés publics (AMP), lorsque le contrat comporte une dépense qui est égale ou supérieure au montant déterminé par le gouvernement.

Une entreprise qui est déclarée coupable de l’une ou l’autre des infractions prévues à l’Annexe I de la Loi sur les contrats des organismes publics (LCOP), en vertu d’un jugement définitif, est inadmissible aux contrats publics pour une durée de cinq (5) ans à compter du moment où cette déclaration est consignée au Registre des entreprises non admissibles aux contrats publics (RENA).

Les faits

Le 21 janvier 2021, la Cour supérieure rendait une décision par laquelle elle ordonnait à l’AMP de retirer l’inscription de l’entreprise demanderesse, MétalLe 21 janvier 2021, la Cour supérieure rendait une décision par laquelle elle ordonnait à l’AMP de retirer l’inscription de l’entreprise demanderesse, MétalPlus inc. (Métal Plus) du RENA.

Le 11 septembre 2019, l’AMP inscrivait Métal Plus sur le RENA, suivant la déclaration de culpabilité de cette dernière à une infraction visée à l’article 122 4° de la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d’oeuvre dans l’industrie de la construction (loi R-20), soit d’avoir transmis sciemment à la Commission de la construction du Québec quelque renseignement ou rapport faux ou inexact.

Métal Plus demande à la Cour supérieure d’annuler la décision rendue par l’AMP, car l’infraction pour laquelle elle a plaidé coupable ne se trouve pas à l’Annexe I de la LCOP. En effet, l’Annexe I ne vise que la première infraction prévue à l’articleMétal Plus demande à la Cour supérieure d’annuler la décision rendue par l’AMP, car l’infraction pour laquelle elle a plaidé coupable ne se trouve pas à l’Annexe I de la LCOP. En effet, l’Annexe I ne vise que la première infraction prévue à l’article122 4° de la loi R-20, soit « Quiconque, détruit, altère ou falsifie un registre, une liste de paye, le système d’enregistrement ou un document ayant trait à l’application de la loi, d’un règlement ou d’une convention collective (…) ». La seconde infraction prévue à l’article 122 4° de la loi R-20, soit « Quiconque (…) transmet quelque renseignement ou rapport faux ou inexact (…) » en vertu de laquelle Métal Plus a plaidé coupable, ne s’y trouve pas.

Le jugement de la Cour supérieure

Métal Plus affirme que la description sommaire contenue à l’Annexe I confirme l’intention du législateur de ne viser que cette infraction spécifique et non pas celle pour laquelle elle a été déclarée coupable. Elle soutient donc que son inscription sur le RENA a été faite sans droit.

L’AMP soumet que l’article 122 4° de la loi R-20 doit avoir préséance sur la description sommaire contenue à l’Annexe I. Elle plaide que l’objectif de la LCOP est d’assurer l’intégrité des entreprises contractant avec les organismes publics et qu’il serait contraire à l’esprit de la loi de limiter la portée de l’Annexe I à la seule portion de l’article 122 4° concernant la première infraction qui y est fait mention.

Le Tribunal ne partage pas l’avis de l’AMP. Le texte de l’Annexe I est clair. Le législateur a voulu, dans la description sommaire, identifier les infractions pour lesquelles il y aurait inadmissibilité d’une entreprise aux contrats publics, en enca-Le Tribunal ne partage pas l’avis de l’AMP. Le texte de l’Annexe I est clair. Le législateur a voulu, dans la description sommaire, identifier les infractions pour lesquelles il y aurait inadmissibilité d’une entreprise aux contrats publics, en enca-drant ou restreignant la portée de certaines des dispositions législatives entraînant une telle inadmissibilité.

Il n’appartient pas au Tribunal, ni à l’AMP de réécrire la loi – ce rôle appartient au législateur. Si celui-ci avait souhaité inclure les autres infractions prévues à l’article 122 4° de la loi R-20, il l’aurait fait.

Le pouvoir de l’AMP n’est aucunement discrétionnaire et ne se limite qu’à inscrire une entreprise au RENA si l’infraction dont elle a été déclarée coupable se retrouve à l’Annexe I. L’AMP ne peut donc élargir la portée de l’Annexe I pour y ajouter des infractions qui n’y sont pas spécifiquement prévues.

Par conséquent, la Cour supérieure ordonnait à l’AMP de retirer l’inscription de Métal Plus du RENA.

Inscrivez-vous à notre infolettre

Pour toujours être informé sur les actualités de la construction