Autoconstruction et garantie des bâtiments résidentiels neufs : rien de simple

Autoconstruction et garantie des bâtiments résidentiels neufs : rien de simple
Maria Cristina Argento, avocate
Maria Cristina Argento, avocate
Chroniqueur Juridique

Dans la décision Garantie de construction résidentielle (GCR) c. De Andrade, la Cour d’appel a eu à se pencher sur la question de savoir si une maison construite en autoconstruction, et en partie par un entrepreneur général, est assujettie au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (Règlement).

Explications

En septembre 2016, Jessica Maréchal et Philippe Desranleau ont accepté une soumission de l’entrepreneur MVP Rénovation (2009) inc. (MVP) pour réaliser des travaux pour construire une maison neuve.

En mai 2017, en tant que prétendus bénéficiaires du plan de garantie, Jessica Maréchal et Philippe Desranleau ont soumis une réclamation à l’administrateur, Garantie de construction résidentielle (GCR) en raison de divers défauts constatés. La réclamation a été acceptée en partie par GCR et cette dernière ordonnait à MVP d’effectuer certains travaux correctifs.

MVP a porté cette décision en arbitrage en invoquant que les bénéficiaires ont agi en tant qu’autoconstructeurs et qu’ainsi, le Règlement est inapplicable.

Le 23 juillet 2018, l’arbitre, Me Avelino De Andrade, accueillait la demande de MVP et annulait la décision de GCR. L’arbitre considérait qu’un entrepreneur, pour avoir l’obligation d’enregistrer un bâtiment auprès de GCR aux fins de l’application du plan de garantie, devait avoir agi comme entrepreneur général, au sens de l’article 4 du Règlement sur la qualification professionnelle des entrepreneurs et des constructeurs-propriétaires, qui énonce ce qui suit :

« La licence d’entrepreneur général est requise de tout entrepreneur dont l’activité principale consiste à organiser, à coordonner, à exécuter ou à faire exécuter, en tout ou en partie, des travaux de construction compris dans les sous-catégories de licence de la catégorie d’entrepreneur général, ou à faire ou à présenter des soumissions, personnellement ou par personne interposée, dans le but d’exécuter ou de faire exécuter, en tout ou en partie, de tels travaux. »

L’arbitre concluait donc qu’il s’agissait d’une autoconstruction, que MVP n’avait pas agi en fonction de sa licence 1.1.1, ni à titre d’entrepreneur général, puisqu’il n’a jamais assuré le contrôle ou la supervision du chantier.

En août 2018, GCR contestait la décision de l’arbitre devant la Cour supérieure, laquelle a accueilli la demande et annulé la décision de l’arbitre.

La Cour supérieure est arrivée à la conclusion que le raisonnement de l’arbitre était déraisonnable et que la logique et la cohérence du raisonnement de l’arbitre s’appuyaient essentiellement sur une définition d’entrepreneur général restreinte à un entrepreneur dont l’activité principale serait l’organisation et la coordination des travaux d’un projet de construction.

Selon la Cour supérieure, si la définition d’entrepreneur au Règlement comprend l’entrepreneur qui supervise les travaux de sous-traitants, elle inclut tout autant l’entrepreneur qui exécute en tout ou en partie les travaux de construction du bâtiment neuf.

Ce qu’en dit la Cour d’appel

Le 4 octobre dernier, la Cour d’appel accueillait l’appel intenté par MVP et rétablissait la sentence arbitrale rendue le 23 juillet 2018. Selon la Cour d’appel, la décision rendue par l’arbitre n’était pas déraisonnable et n’aurait pas dû être infirmée par la Cour supérieure.

La preuve prépondérante démontrait que MVP avait agi dans le cadre de sa licence d’entrepreneur spécialisé pour des travaux de construction compris dans l’une des sous-catégories de cette licence et que ces travaux étaient organisés ou coordonnés par les propriétaires.

Au regard de cette preuve, l’arbitre pouvait raisonnablement conclure que MVP n’avait pas agi en sa qualité d’entrepreneur général et que le seul fait d’être titulaire d’une licence de cette catégorie ne pouvait venir modifier son véritable statut sur le chantier.

L’assujettissement au Règlement implique donc nécessairement les critères d’organisation et de coordination de l’ensemble des activités de construction par l’entrepreneur, d’autant plus que le Règlement s’applique dans le cadre d’un contrat conclu entre un bénéficiaire et un entrepreneur pour la vente ou la construction d’un bâtiment résidentiel neuf et non simplement pour l’exécution de travaux de construction.

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