En matière de SST, l’employeur et le maître d’oeuvre doivent respecter les lois en vigueur, mais également les règles de l’art, les recommandations… et le gros bon sens.
Comme nous le savons, afin de veiller à la santé et à la sécurité des travailleurs, les entrepreneurs en construction doivent respecter les lois en vigueur sur les chantiers, notamment le Code de sécurité de la construction, ainsi que la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST). Mais ce n’est pas tout.
Certaines décisions imposent désormais l’exigence de se conformer à des recommandations d’organismes gouvernementaux, ou encore, à des normes de sécurité étrangères.
Dans une décision de novembre 20201, la Cour du Québec conclut que les recommandations de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) quant aux risques de contamination à la COVID-19 auraient dû être appliquées par le maître d’oeuvre dans ce cas-ci.
En effet, lors d’une visite sur un chantier de la défenderesse le 19 mai 2020, l’inspecteur constate que les aires communes ne sont pas nettoyées et désinfectées deux fois par quart de travail, que le nettoyage des mains à l’entrée du chantier n’est pas contrôlé, que les questionnaires sur l’état de santé des travailleurs ne sont pas vérifiés ou analysés, notamment.
Or, l’INSPQ avait émis une série de recommandations spécifiques au secteur de la construction.
L’inspecteur est alors d’avis qu’en contexte de pandémie, ces lacunes constituent un danger pour la santé et la sécurité du travailleur et que la défenderesse contrevient à l’article 51 (5) de la LSST.
Cet article impose à l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour protéger la santé et la sécurité des travailleurs, en utilisant des méthodes et des techniques qui contrôlent et éliminent les risques étrangers.
En référant à la définition courante du mot « recommandation », le Tribunal conclut que les règles de l’art établies par l’INSPQ doivent régir la façon dont devraient se comporter les acteurs en l’espèce.
À cet effet, la juge en appelle au bon sens et indique que « les recommandations de l’INSPQ ne sont que le reflet du gros bon sens à adopter dans la situation épidémiologique actuelle ».
La référence au bon sens est par ailleurs couramment utilisée pour déterminer si un employeur a exposé ses travailleurs à un danger. Dans une décision de 20162, la Cour supérieure indique que l’appréciation « du caractère dangereux ou non d’une situation donnée se déduira habituellement du bon sens ».
Ainsi, même si une mesure n’est pas prescrite par une loi ou un règlement, si son application s’infère par ailleurs du bon sens, elle doit être appliquée par l’employeur, de surcroît en temps de pandémie mondiale.
1. Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail c. 8653631 Canada inc., 2020 QCCQ 6684.
2. Québec (Ville de ) c. Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST), 2016 QCCS 208.