Le Québec entier est en pénurie de main-d’œuvre et malheureusement l’industrie de la construction n’est pas exclue de ces défis de main-d’œuvre grandissants. En fait, les chiffres indiquent un besoin d’environ 20 000 nouveaux travailleurs annuellement pour les 10 prochaines années.
En avril 2021, huit mesures réglementaires ont été adoptées afin de contrer la pénurie de la main-d’œuvre venant ainsi permettre, entre autres, l’augmentation du nombre de compagnons, la supervision en chantier d’un deuxième apprenti ainsi qu’une meilleure polyvalence et efficience au travail. Ces mesures permettent de s’adapter à la nouvelle réalité sur les chantiers de construction.
Portrait global des infractions pénales en 2020
L’objectif premier des interventions de la Commission de la construction du Québec (CCQ) est d’assurer le respect et l’application de la Loi, des règlements et des conventions collectives sur les chantiers.
En 2020, c’est plus de 6394 infractions détectées en chantier et ce, principalement pour des infractions pénales. De ces infractions, 3704 constats ont été judiciarisés avec un ratio de culpabilité de 86 %1.
Une majorité des constats d’infractions émis étaient liés à la juridiction de métier, le ratio compagnon/apprenti, la notion de surveillance immédiate d’un compagnon et l’absence de détention d’un certificat de compétence.
La défense de diligence raisonnable en pénurie de main-d’œuvre
Bien que la réglementation se soit adaptée récemment, le manque de disponibilité de la main-d’œuvre existe depuis plusieurs années. Que faire des constats d’infractions ayant été donnés avant le changement réglementaire ou même des constats d’infractions donnés alors qu’il n’y avait aucune autre main-d’œuvre disponible ?
Le principe de diligence raisonnable est une défense qui existe depuis la nuit des temps en droit. La prémisse de base est de savoir si une personne raisonnable placée dans la même situation aurait agi de la même façon. On y évalue alors la prudence, les connaissances et les aptitudes qu’une personne dite raisonnable est censée avoir. La personne doit agir avec précaution dans l’exercice de l’activité qui a donné lieu à l’infraction. Cela se reflète par des démarches rigoureuses et des efforts considérables pour éviter la commission de l’infraction. Non seulement il est question de diligence, mais la personne doit être proactive et varier les démarches afin de prévenir l’infraction.
Concrètement, comment un employeur peut-il s’acquitter d’une défense de diligence raisonnable ? Par exemple, dans le cas d’un constat d’infraction pour ratio, la Cour du Québec a reconnu les démarches suivantes comme pouvant appuyer la preuve de diligence raisonnable : faire une demande de main-d’œuvre à la CCQ, faire des appels aux travailleurs disponibles selon la liste offerte et noter leurs réponses; faire des annonces ou des affichages sur les réseaux sociaux, effectuer de la location de main-d’œuvre à une autre entreprise, faire appel à une agence de placement et obtenir une liste de noms auprès des syndicats.
Attention, encore une fois, l’ACQ suggère fortement de respecter la Loi et les règlements en vigueur dans l’industrie de la construction. Toutefois, lorsqu’il devient difficile de respecter les dispositions d’une loi ou d’un règlement, une défense de diligence raisonnable valable peut permettre l’acquittement. Encore faut-il que l’employeur ait fait des démarches sérieuses pour respecter la réglementation et que ces démarches soient documentées, puisqu’en droit, il ne s’agit pas de ce que l’on sait, mais de ce que l’on est capable de prouver.
Il est toujours mieux d’éviter une infraction lorsque cela est possible, comme le dit le dicton, vaut mieux prévenir que guérir. Nous soulignons tout de même la reconnaissance qu’ont eu les tribunaux de droit commun à l’égard des difficultés opérationnelles d’un chantier de construction en pleine pénurie de travailleurs.
Enfin, l’équipe des relations du travail de l’ACQ peut vous aider avant même la perpétration d’une infraction afin de vous assurer que vous effectuez toutes les démarches nécessaires pour éviter une infraction et ce, en conformité de la Loi et des règlements dans l’industrie de la construction.
1 Commission de la construction du Québec, Rapport annuel de gestion 2020.