Le bruit : Impacts sur les travailleurs et pistes de solutions

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Quels sont les impacts du niveau de bruit de vos chantiers de construction sur la santé de vos travailleurs ? Est-ce que ce niveau de bruit respecte la réglementation en vigueur ? Quels sont les changements à venir dans la réglementation ? En cas de dépassement, quelles sont les mesures préventives prévues ? Tour d’horizon.

Qu’ils soient charpentiers-menuisiers, manoeuvres, ferrailleurs ou opérateurs de machinerie lourde, les travailleurs de la construction sont fréquemment exposés au bruit sur les chantiers de construction. En plus du bruit émis par leur propre travail, ils sont exposés à d’autres bruits, entre autres, produits par les outils à impact, les outils pneumatiques, les outils manuels, les moteurs, l’usage d’explosifs, les alarmes de véhicule, etc.

Qu’est-ce qu’un bruit ?

On définit le bruit comme étant un son, ou un ensemble de sons, jugé indésirable soit parce qu’il est déplaisant ou agaçant, soit parce qu’il gêne la perception d’un autre son, ou parce qu’il est dommageable pour la santé. L’amplitude est la variation de pression de l’air produite par une source de bruit. Elle correspond au niveau d’intensité ou au volume (faible ou fort) d’un son. L’intensité d’une onde sonore diminue à mesure que l’on s’éloigne de la source de bruit. Le décibel (dB) est l’unité de mesure du son et le dBA est une valeur pondérée qui donne la perception réelle de l’oreille humaine. Cette pondération est utilisée, par exemple, lors de l’évaluation des effets de l’intensité sonore
d’un bruit continu sur la santé humaine.

Impact du bruit au travail

Dans l’introduction de son Étude de la transmission sonore à travers les protecteurs auditifs et application d’une méthode pour évaluer leur efficacité en milieu de travail Partie 1 – Étude terrain (version révisée), l’IRSST indique qu’à l’heure actuelle, on estime que plus de 400 000 des 2,5 millions de travailleurs du Québec sont exposés quotidiennement à des niveaux de bruit susceptibles d’engendrer des problèmes d’audition et au moins 100 000 d’entre eux sont aux prises avec les conséquences d’une surdité professionnelle¹.

Selon l’ASP Construction, si la durée et l’intensité de l’exposition au bruit peuvent avoir des conséquences graves sur l’audition (surdité temporaire ou permanente) et des acouphènes, elle peut aussi causer des impacts sur la santé cardio-vasculaire, de la fatigue et du stress.

Non seulement le bruit affecte-t-il la santé
des travailleurs, mais il a un effet certain sur les risques d’accident du travail. Les travailleurs habitués au bruit ou portant des protecteurs auditifs peuvent avoir plus de difficulté à détecter ou à reconnaître des signaux d’alarme et d’avertissement. Ils peuvent également avoir de la difficulté à détecter des sons faibles. Leur vigilance peut ainsi en être affectée.

La réglementation

Le Code de sécurité pour les travaux de construction (CSTC) détermine les niveaux limites de bruit continu et de bruit d’impact permis. Ces derniers se définissent comme suit :

  • Bruit continu : « tout bruit qui se prolonge dans le temps, y compris un bruit formé par les chocs mécaniques de corps solides ou par des impulsions répétées à une fréquence supérieure à une par seconde ».
  • Bruit d’impact : « tout bruit formé par les chocs mécaniques de corps solides ou par des impulsions répétées ou non à une fréquence inférieure ou égale à une par seconde ».

Actuellement, au Québec, la limite d’exposition au bruit continu est de 90 dBA pour 8 heures tandis qu’au Canada, pour les administrations sous compétence fédérale, la valeur limite d’exposition pour un bruit continu est de 87 dBA pour 8 heures et toutes les autres provinces canadiennes ont une valeur limite d’exposition de 85 dBA pour 8 heures.

Évidemment, plus le niveau sonore dépasse cette limite, plus le temps d’exposition doit être court.

Pour ce qui est des bruits d’impact, les valeurs permises - situées entre 120 dB linéaires et 140 dB linéaires - sont déterminées en fonction du nombre d’impacts pendant 8 heures d’exposition.

ADMINISTRATION
(fédérale, provinciale, territoriale)
BRUIT
CONTINU
BRUIT
impulsif / d’impact
Niveau d’exposition maximal admissible pour 8 h, en dB(A)Niveau de pression de crête maximal, en dB (crête)Nombre maximal d’impacts
Canada
(administration fédérale)
87 - -
Colombie-Britannique 85 140 -
Alberta 85 - -
Saskatchewan 85 - -
Manitoba 85 - -
Ontario 85 - -
Québec 90 140 100
Nouveau-Brunswick 85 140 -
Nouvelle-Écosse 85 - -
Île-du-Prince-Édouard 85 - -
Terre-Neuve et Labrador 85 - -
Territoires du Nord-Ouest 85 140 100
Nunavut 85 140 -
Yukon 85 140 90
Source : Fiches signalétiques (FS) – Limites d’exposition au bruit au Canada, Réponses SST, Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail (CCHST), mis à jour le 12 juillet 2016, Réimprimé avec l’autorisation du CCHST, 2018.

Modification à la réglementation

En 2016, un sous-comité de révision du Règlement sur la santé et la sécurité du travail (RSST) a été mis sur pied par la CNESST. L’ACQ, entre autres, siège à ce comité. Le mandat de ce comité est de proposer des modifications à la section XV du RSST concernant le bruit ainsi qu’aux articles correspondants du Code de sécurité pour les travaux de construction (CSTC).

De plus, la CNESST, dans sa planification des travaux réglementaires 2018 – volet santé et sécurité du travail, a indiqué qu’elle proposera des modifications réglementaires visant à actualiser les exigences au regard de l’exposition au bruit en milieu de travail, s’assurera qu’elles offrent une meilleure protection du travailleur et qu’elles seront cohérentes avec les pratiques reconnues.

Après plusieurs séances de discussion, le sous-comité de révision suggère de réduire la valeur limite d’exposition au bruit de 90 dB à 85 dB pour une période de 8 heures. Conscients que de descendre cette valeur limite même d’un seul décibel peut coûter plusieurs milliers de dollars aux entrepreneurs, les membres du sous-comité de révision essaient de trouver des solutions qui seront acceptables pour les entrepreneurs.

Pistes de solution

Echelle de bruit

RÉDUIRE LE BRUIT À LA SOURCE

Il existe plusieurs façons de réduire le bruit à la source.

  • Utiliser des méthodes moins bruyantes : utiliser une mâchoire au lieu d’un marteau piqueur
  • Effectuer un entretien préventif de l’équipement
  • Installer un silencieux sur le compacteur ou le compresseur
  • Utiliser l’énergie électrique au lieu d’une alimentation par combustion
  • Diminuer la pression lors de l’utilisation de l’air comprimé
  • Utiliser une lame antibruit pour les scies à béton
  • Remplacer une transmission par engrenage par chaîne ou en métal par une courroie
  • Modifier les équipements : ex. : poignée insonorisante sur une meuleuse.

Dans le document de l’ASP Construction, Le bruit dans la construction, on mentionne que Le National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH) a lancé le programme « Buy Quiet » afin de réduire les niveaux de bruit auxquels sont exposés les travailleurs. Le site Web conçu dans le cadre de ce programme présente des informations visant à promouvoir l’utilisation des machines et des outils plus silencieux, dans le but de réduire la perte auditive des travailleurs : http://www.cdc.gov/niosh/topics/buyquiet/

ISOLER TOUT POSTE DE TRAVAIL EXPOSÉ AU BRUIT

Dans son document, l’ASP Construction recommande aussi, lorsque la diminution du bruit à la source est impossible, la mise en place de moyens pour empêcher la propagation du bruit. Afin d’éviter la propagation du bruit, voici quelques recommandations :

  • Éloigner les travailleurs de la source du bruit
  • Installer des cloisons ou des écrans pour bloquer et absorber le bruit entre la source (ex. : compresseur) et le travailleur
  • Réduire la propagation des vibrations produites par les machines (ex. : ajouter des amortisseurs).

LIMITER LE TEMPS D’EXPOSITION OU PORTER UNE PROTECTION AUDITIVE

Afin de limiter le temps d’exposition des travailleurs au bruit, l’ASP Construction suggère :

  • Effectuer les travaux les plus bruyants lorsque les travailleurs sont en nombre réduit
  • Répartir le travail entre plusieurs travailleurs (rotation des travailleurs) et prévoir des périodes de repos.

Selon le CSTC, chaque fois qu’un travailleur est exposé à des bruits qui excèdent le niveau permis, l’employeur doit placer près du poste de travail, une affiche indiquant que le port de protecteurs auditifs est obligatoire (CSTC, art. 2.10.7.7). Toutefois, la protection auditive (bouchons ou coquilles) devrait être utilisée en dernier recours, faute d’autres solutions. Toujours selon le CSTC, les protecteurs auditifs doivent être conformes à la norme CSA Z94.2 Protecteurs auditifs : Performance, sélection, entretien et utilisation (CSTC, art. 2.10.7.6).

À lire aussi : Le bruit : avantages et inconvénients des protecteurs auditifs

Cet article a été écrit en collaboration avec Alain Lahaie, chef de service, prévention des lésions professionnelles, Direction de la santé, sécurité du travail et Mutuelles de prévention de l’ACQ

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